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Bol à inscription poétique

seconde moitié du XIVe siècle ?

Cette forme à panse renflée se rétrécissant vers l'ouverture, au bord épais, semble apparaitre dans le deuxième quart du XIVe siècle, à la fois dans les domaines mamlouk et mongol (Iran- et Irak). Le décor, quant à lui, se compose d'un large registre central délimité par une double ligne gravée, entre deux bandes laissées lisses. Dans la partie inférieure, une frise ponctuée de feuilles pointues (lancettes) souligne l'incurvation vers le fond. Le registre central se compose d'une suite de six cartouches oblongs aux extrémités polylobées, se détachant sur un fond tapissé d'un motif « maillé », en gradins de merlons, que l'on retrouve sur les médaillons en larme qui ponctuent le centre de chaque cartouche. Ce motif trouve son origine en Iran; il se retrove ensuite sur les métaux incrustés des maîtres de Mossoul ayant immigré vers la Syrie et l'Egypte vers le milieu du XIIIe siècle. Il est toutefois plus inhabituel sur les métaux d'époque mamlouke, les exemplaires connues les plus tardifs concernent un chandelier daté de 668 H./ 1269 du musée d'art islamique au Caire [1] et un grand bassin daté de 684H/ 1285 conservé au musée du Louvre [2]. Quant aux médaillons en larmes cités plus haut, ils ne trouvent aucun parallèle. En revanche, le motif gravé au fond du bassin et figurant une rosace spiralée inscrite dans un cercle est un trait commun à un certain nombre de métaux à décor gravé attribuables à la fin du XIVe ou au début du XVe siècle [3]. L'inscription se lit ainsi :« Puisses-tu ô mon propriétaire ne jamais cesser d'être serein/ libre de tout souci/ Puisses-tu te trouver toujours dans l'abondance de félicités et de faveurs/ dans la jouissance du bonheur qui jamais ne s'épuise... gloire et prospérité/ Prospérité, puisses-tu te trouver toujours dans l'abondance de félicité.../ Puisses-tu te trouver toujours dans l'abondance de félicité... »Malgré quelques incohérences (surtout dans la répétition finale), cette inscription est particulièrement intéressante : de nature poétique, elle apparait sur plusieurs métaux publiés, attribuables par leur décor au milieu du XIVe siècle : un petit bassin du musée du Bargello à Florence [4], deux seaux du musée diocésain de Trévise et du Museo Correr à Venise [5], un plat de la collection Aaron, une boîte du British Museum à Londres, un bassin de la collection Medina [6] et un bol passé en vente à Paris [7]. Tous ces métaux sont en alliage cuivreux incrusté d'argent, d'une apparence plus luxueuse que celle de notre bol et d'un style bien différent. Celui-ci trouve toutefois un parallèle intéressant avec un vase conservé au musée du Louvre [8] qui présente une technique similaire de décor simplement gravé, avec, par endroits, l'emploi de merlons imbriqués ; le vase comporte en outre deux cartouches contenant un fragment des mêmes vers poétiques. Signalons encore deux pièces au décor apparenté (gradins de merlons, décor végétal et épigraphique gravé, sans incrustation) : un chandelier dans les collections du Cheikh Faysal bin Qassim al-Thani au Qatar [9] et un bol du musée des Beaux-Arts de Lyon [10].La vogue de ces inscriptions poétiques semble s'être développée à la fin du XIVe siècle, comme l'atteste un autre ensemble, assez important, de métaux répétant une inscription poétique différente, louant la bonne fortune du propriétaire [11],ou encore une troisième citation pétique débutant par une allusion à la beauté de l'objet [12]. Sans doute étaient-ils destinés à une clientèle « civile » autant qu'à l'élite militaire - souvent plus soucieuse d'afficher une pompeuse titulature sur ces objets de prestige - ou encore destinés à l'exportation, ainsi que l'atteste leur présence, parfois ancienne, dans les collections italiennes. C.J.[1] inv. 1657 ; Wiet 1932, pl. XXVII.[2] inv. OA 6316 ; voir cat. exp. Paris 1989-1990, p.211.[3] Behrens-Abouseif 2005, p. 172.[4] Cat. exp. Venise 1993-1994, n° 174.[5] ibid., nos 180, 181.[6] ibid., n°180.[7] vente Drouot, Arts de l'islam, 10 novembre 1989, lot 46.[8] Inv. MAO 773, inédit.[9] al-Baghdadi 2002, p. 36. Son inscription contient une titulature.[10] Inv. H. 1182, inédit. L'inscription, quelque peu incohérente, comporte une dédicace à un émir anonyme puis une suite de vœux.[11] Allan 1969 ; id. 1971; Melikian-Chirvani 1974, p. 112.[12Voir Behrens-Abouseif 2010, p.178-184.

Présentation de l'œuvre

Région
Egypte ou Syrie
Date
seconde moitié du XIVe siècle ?
Lieu
Egypte ou Syrie

Caractéristiques

Matières
Alliage cuivreux, décor gravé et doré

Données spécifiques

Numéro d'inventaire
R 68
Musée d'accueil
Musée Calvet